3 questions à Luc Abbadie, professeur émérite en écologie à Sorbonne Université et vice-président du conseil scientifique de l’Office français de la biodiversité.
Pourquoi s’intéresser à la séquestration du carbone ?
« On s’intéresse beaucoup à la présence du carbone dans les sols et la végétation pour deux grandes raisons. Tout d’abord, lorsque le carbone est séquestré dans la végétation, il n’est pas dans l’atmosphère et ne provoque donc pas l’effet de serre responsable du dérèglement climatique. D’autre part, on a tendance à l’oublier mais le carbone organique qu’on appelle aussi l’humus, est une composante majeure de la fertilité des sols, qu’ils soient naturels ou cultivés. »
La Grande Muraille verte capte-t-elle plus de carbone qu’un sol nu ?
« Si vous avez un sol sans végétation, il peut y rester du carbone résiduel qui date de plusieurs milliers d’années, mais il ne se passera rien. En revanche, mettre en place une couverture végétale dans cette région conduira rapidement à une augmentation du stock de carbone mesurable. Toute la littérature scientifique assure que planter des arbres dans ce genre de lieux est une très bonne pratique pour augmenter le stock de carbone. On reconstitue un potentiel biologique et productif qui ensuite pourra être remis en culture, ce qui diversifie l’activité dans ces zones soumises à une tension forte en termes d’élevage. »
Que pensez-vous de la recherche africaine dans votre domaine ?
« Dans les sciences du sol et l’écologie en général, pas mal de pays disposent d’équipes de chercheurs avec les compétences requises au niveau international pour contribuer à l’avancement des connaissances et qui publient régulièrement. Ceci malgré des conditions matérielles souvent compliquées. Si vous avez besoin d’une expertise en écologie, vous avez toutes les chances de la trouver en Côte d’Ivoire. D’autre part, j’ai vu des protocoles de recherche en agronomie très lourds mis en place au Burkina Faso. On voit apparaître une sorte d’indépendance scientifique sur des sujets comme ceux-là. »
Luc Abbadie est intervenue lors de la journée d’étude sur la séquestration carbone organisée en novembre 2024 par l’Institut Balanitès.
Lors du prochain symposium sur la Grande Muraille verte organisé par l’Institut Balanitès à Poitiers, une nouvelle table-ronde sur la séquestration carbone dans le contexte sahélien aura lieu le 23 septembre en présence notamment d’Armel Prieur, initiateur de l’Institut du Compte carbone qui propose une démarche de compensation carbone pour les particuliers.
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